samedi 25 juillet 2020

ARTICLE 18: EDEN, Rapport de bataille campagne Drotystin

« -Comment va-t-elle ?
-C’est pas la grande forme, elle a morflé, mais elle est en un seul morceau.
-Bien. Elle est réveillée ?
-Oui. »

Niklaus entra dans la tente où l’on avait ramené Ingrid. Elle était apparue à la tombée de la nuit, tel un cadavre ambulant, et s’était effondrée dans le campement. Le matin même, elle avait décidé d’accompagner l’expédition mené par Heinrich. Il avait entrepris d’explorer Drotysin. Lieu maudit, d’après les légendes. Ingrid était revenue seule.
Allongé sur un vieux lit de camp de récup, Ingrid ne dormait pas. Elle ne dormirait plus jamais. Elle tentait de se redresser, mais d’un geste compatissant, Niklaus lui fit comprendre que ce n’était pas nécessaire, ni dans son intérêt.

« -Je ne vais pas t’embêter longtemps, tu as besoin de repos. Mais il me faut des réponses, il en va de la sécurité de notre groupe. Ingrid, est ce que… est-ce que tu peux me dire… ce qui s’est passé…Ingrid ? »

Elle ne répondit pas. Ses yeux vides fixaient le plafond de la tente. Niklaus insista. Alors elle expliqua :

« -On s’est fait massacrer ! Ils y sont tous restés. On y restera tous ! »

Le petit groupe, mené par Heinrich était composé de Jürgen, Georg, Gretchen et de Louie, le p’tit singe de Gretchen. Elle avait décidé de les accompagner malgré les réticences de Heinrich.

« -On sait pas ce qu’on va trouver, hein ! Alors tu joues pas au héros et tu me traînes pas dans les pattes, fillette, c’est clair !
-Oui M’sieur… »

L’objectif était d’explorer les ruines d’une vieille ville, Drotysin, afin de trouver de quoi ravitailler le Convoi, en vivre et en matériel. Elle avait déjà cru entendre ce nom, mais elle n’y prêta pas attention.

« -Tu vois quoi Gretchen, avec ton joujou ?
-Des ruines, des containers, des poubelles et d’autres merdes qui pourront peut-être nous servir.
-Rien d’autre ?
-Non, rien d’autre.
-Faut être sûr, hein fillette. C’est pas qu’une fois qu’on est dans la merde qu’il faut se rendre compte qu’on a pas de PQ !
-Tu veux ma longue vue ?
- Georg pas besoin de PQ. Georg…
-On s’en fou, le débile !
-Georg pas débile. Georg quand enfant…
-Louie ! Qu’est-ce que maman a dit ? On tire pas la langue à ce débile….
-Vos gueules ! Je vois un truc là. Merde, des Khans. Avec le grand tout vert.
-Ben ça fera un pote à Georg pour discuter PQ…
-Préparez-vous à les attaquer. C’est pas la peine de les éviter, ils sont là pour la même raison que nous. Pas question de leur laisser la place. Si vous voulez pas finir dans l’estomac de ces gros nazes, faut vous sortir les doigts !
-C’est une métaphore, hein ?
-Pour les doigts, oui. Pas pour leur régime alimentaire ! »

Ingrid se tut. Niklaus lui tendit une tasse remplit d’un breuvage chaud.

« -Bois, ça va t’aider ».

Elle obéit machinalement. Le liquide chaud n’avait aucun goût, mais la revigora.

« -Ensuite, Ingrid, que s’est-il passé ?
-… Jurgen s’est avancé, imprudemment. Heinrich aussi. Le géant tout vert, il a…il a soulevé un autre type, deux fois plus grand que toi et l’a transporté. Goerg, il a l’air d’un gosse de 6 ans à côté de ça. Il était armé de deux tronçonneuses. Jürgen est tombé le premier. Et puis, je crois qu’il y avait une femme dans leur groupe, en retrait. Je crois que c’est une sorcière. Elle à mis le feu au géant. Il y en avait un quatrième, mais je sais pas trop ce qu’il fichait là. »

Ingrid se mit à pleurer. Elle renifla et semblait avoir repris ses esprits.

« - Ensuite Georg s’est rué sur le type avec ses tronçonneuses, mais il a été obligé de battre en retraite ! C’est à ce moment qu’il est sorti des égouts…
-Qui est sorti des égouts ?... Ingrid ? Qui-est-sorti-des égouts ?
-Je ne sais pas ce que s’était, Niklaus, mais c’était rapide, puissant et blindé. On l’a vu en premier. J’avais même pas remarqué que Heinrich était mort. J’ai vu Georg tombé sous les coups des tronçonneuses alors que le Géant fonçait sur Gretchen et moi.  Et puis, ils ont capté qu’il y avait quelqu'un d’autre. Cette chose a arraché la tête du gars avec les tronçonneuses comme on décapsule une bouteille. Le Géant vert a tenté de s’interposer, mais l’autre, il prenait le dessus. Facilement. J’étais tétanisée. Tous mes camarades sont morts. Je restais là, incapable de bouger. Les Khans fuyaient, laissant le géant aux prises du monstre. Et puis… Alors qu’il allait l’achever, il renifla quelque chose dans les airs, et vif comme l’éclair, il s’engouffra dans une bouche d’égout, laissant sa victime agoniser.

J’ai fui, Niklaus ! J’ai fui et j’ai laissé mes compagnons aux mains de cette chose ! »

Elle s’effondra, pleurant toute l’eau que son corps contenait, une eau si précieuse à la survie du Convoi. Quel gâchis, se dit Niklaus. Il culpabilisa d’avoir cette pensée.

« -Tu ne pouvais rien faire d’autre. Repose-toi maintenant. »

Il quitta la tente.

Quelle que soit la chose qu’Ingrid à vue, ou cru voir, c’est un problème. Niklaus se demandait s’il devait envoyer un groupe à la recherche de ses compagnons disparus. Il fut interrompu dans ses réflexions par un cri.
« Niklaus ! Viens, vite ! »…

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